9 avr. 2010

Il y a tant à offrir

Le petit déjeuner est l’égal du dîner d’hier soir. Il y a profusion de nourriture sur la table et je me régale de la charcuterie, des gâteaux et du thé de Mme Motyssek. Celle-ci m’offre en prime une quantité incroyable de nourriture pour la route. Il me faut réfléchir à deux fois avant de trouver où caser le tout dans mes sacoches. J’espère que la route à venir va être plate car cette fois ci j’ai du surpoids. Ce matin il fait grand soleil mais je décide de ne pas rouler car Mme Motyssek tient à me présenter le centre Caritas de la ville où elle travaille. Ce centre est la maison du bonheur qui vient en aide aux handicapés mentaux, aux personnes dépendantes d’addictions et aux familles dans le besoin. J’y rencontre David, un jeune de mon âge qui s’occupe également de tout ce beau monde. Il a passé un an en France et parle très bien notre langue. Tout de suite nous sympathisons car ce jeune homme a un cœur formidable et le contact très facile.
David réunit tous les pensionnaires et je leur présente mon aventure dans les détails. Les questions fusent et l’intérêt que tous portent à mon égard me fait chaud au cœur. Ces gens ont de lourds problèmes qu’ils en soient conscients ou non, mais leur joie de vivre est telle que toutes les différences s’effacent entre eux et moi. Je suis touché par la convivialité qui règne en ce lieu .Après une petite séance photo, j’ai droit à une visite guidée du premier jardin biblique de toute la Pologne. Le concept est très intéressant et vient d’Israël où ce genre de lieu est très populaire. Les plantes et les aménagements racontent la bible au fur et à mesure que l’on avance dans le jardin. Par exemple la cène est symbolisée par la vigne et le blé comme le vin et le pain partagés par les apôtres. C’est l’exemple le plus facile à expliquer mais chaque plante, chaque rocher, chaque sculpture fait référence à un verset de l’ancien puis du nouveau testament. Le travail de recherches en amont est fascinant. Pour l’instant, le jardin est encore en hibernation, mais l’été venu c’est de toute beauté. Je partage le repas de midi avec David puis c’est déjà l’heure des douloureux au revoir. J’ai la larme à l’œil en quittant tous ces gens généreux et simplement heureux d’offrir ce qu’ils ont à apporter à la communauté. Je quitte Proszcwice métamorphosé. Moi aussi j’ai envie d’aider, ne serait ce que pour rendre la pareille à tous ceux qui m’ont accueilli. Et puis tout cela à l’air tellement enrichissant, il n’y a qu’à regarder David pour comprendre que l’amour que l’on offre nous revient toujours d’une manière ou d’une autre…
La route n’est pas vraiment plate comme je l’avais espéré et le vent me joue de vilains tours. Mais mes pensées sont ailleurs, je ne parviens pas à décrocher les visages de ce matin de mon esprit. Cette campagne polonaise est de plus en plus jolie. Elle est un peu le reflet des gens que j’ai rencontrés aujourd’hui. Anonymes, humbles, simples, mais résolument généreux. Le vent devient assez fort alors je décide de modifier un peu mon itinéraire pour éviter le vent de face. C’est ainsi que j’atteins Busko Zdroj après 60 km. Une demi-journée pour une demi-étape. Je n’irai pas plus loin car la pluie fait son apparition. Le ciel s’est chargé de gris petit à petit tout l’après midi et le soleil a fini par céder.
Je me rends à l’église du centre pour demander l’hospitalité et on me renvoie vers une autre paroisse de la ville. Là bas je rencontre Don Tommaso, prêtre italien en apprentissage en Pologne. Instantanément, je retrouve la bonne humeur et l’enthousiasme transalpins. Echanger quelques mots en italien me rappelle également au bon souvenir du mois fantastique passé là bas. Don Tommaso me renvoie à son tour vers une troisième église où je trouverai un centre Caritas. Il m’y rejoint en voiture pour expliquer ma situation. En Pologne la charité est une organisation formidable. On y trouve des gens qui ont le cœur sur la main. Ici on me nourrit encore de bonne charcuterie, de fromage et de thé. On me loge dans une belle chambre bien au chaud. La Caritas polonaise est encore mieux organisée qu’en Italie. En Italie, chaque paroisse se débrouille dans son coin avec les moyens du bord. Ici tout est centralisé et organisé de manière à venir en aide le plus efficacement possible à ceux qui en ont le plus besoin. Je m’endors bienheureux alors que la pluie bat le pavé avec une force inouïe.

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La vie, c'est comme une bicyclette, il faut avancer pour ne pas perdre l'équilibre.
Albert Einstein.

La jeunesse est une victoire du goût de l'aventure sur l'amour du confort.
Douglas MacArthur.

C’est la contemplation silencieuse des atlas, à plat ventre sur le tapis, entre dix et treize ans, qui donne ainsi l’envie de tout planter là. Songez à des régions comme le Banat, la Caspienne, le Cachemire, aux musiques qui y résonnent, aux regards qu’on y croise, aux idées qui vous y attendent… Lorsque le désir résiste aux premières atteintes du bon sens, on lui cherche des raisons. Et on en trouve qui ne valent rien. La vérité, c’est qu’on ne sait comment nommer ce qui vous pousse. Quelque chose en vous grandit et détache les amarres, jusqu’au jour où, pas trop sûr de soi, on s’en va pour de bon.
Un voyage se passe de motifs. Il ne tarde pas à prouver qu’il se suffit à lui-même. On croit qu’on va faire un voyage, mais bientôt, c’est le voyage qui vous fait, ou vous défait.
Nicolas Bouvier.
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