29 mars 2010

En campagne Hongroise




Encore un bon petit déjeuner ce matin. J’essaye de ne pas trop abuser, mais difficile de se retenir devant cette profusion de fromages, de saucisses et de miel. Si j’avais gagné une heure en traversant la frontière il y a deux jours, je la reperds déjà aujourd’hui, car nous sommes passés à l’heure d’été dans la nuit. Je savais que ça finirait par arriver et je suis heureux d’en être immédiatement informé ! C’est comme si tout se recalait par rapport à mon départ de Septembre. Je suis dans le fuseau horaire de Paris et ma montre et mon compteur donnent enfin la même heure (je n’ai jamais réussi à les changer sans la notice). L’ordre cosmique est aligné, je peux repartir sereinement.
Le soleil brille encore aujourd’hui et le vent est toujours de face mais le matin, en général, ça reste raisonnable. Je finis donc ma traversée de ce beau marais au milieu des petits étangs et des roseaux. Le paysage est joli, mais à la longue je pourrais dire qu’il peut devenir monotone et lassant. Qu’importe, ça roule bien et je profite de cette sensation de liberté qui m’accompagne depuis une semaine. Peu après Tiszafüred, je traverse une immense zone de lacs et ma route serpente entre les étendues d’eau pour se frayer un chemin. Il y a énormément de pêcheurs qui installent leurs lignes et discutent au bord de l’eau en attendant que le poisson morde à l’hameçon. Je suis surpris par le nombre de femmes qui elles aussi s’adonnent à ce hobby d’ordinaire prisé par les hommes.
Je quitte la grande route étroite et dangereuse à cause des camions pour m’engager sur le réseau secondaire. Belle surprise, le revêtement est toujours aussi bon. Je passe quelques villages de campagne où le temps s‘écoule calmement. Pas un bruit sinon celui des tracteurs au loin qui labourent les champs. Encore une fois, j’ai l’impression d’être au milieu de nulle part.
Le décalage horaire m’a fait partir plus tard que d’habitude et il est 13h passé lorsque je m’arrête à Tiszanana pour manger. Alors que je remplis mes gourdes à la fontaine, une petite fille s’approche de moi, un peu intriguée par mon attirail et ma dégaine inhabituelle pour les gens dans le coin. Elle m’invite à la suivre jusque chez elle dans une vieille maison toute proche. Là je rencontre toute la grande famille dont Margaretha et Tibor, les parents. Je compte 9 enfants de 3 mois à 16 ans. Ce sont des tziganes qui n’ont pas de grands moyens mais vivent correctement par rapport à ceux croisés en Roumanie. Margaretha m’offre immédiatement un café, puis voyant que je n’ai pas mangé, elle sort les restes du frigo pour les réchauffer. De bonnes pâtes (proches des spätzles alsaciennes) et du poulet aux oignons. Je me régale. Nous discutons longuement de mon voyage, même si la communication est difficile car le hongrois est une langue qui m’échappe totalement. Cela ne ressemble vraiment à rien de connu et il devient alors difficile d’accrocher le moindre mot dans une phrase. Les jeux de mimes et de dessins seront notre secours et cela amuse beaucoup les enfants. Avant de partir on me propose une connexion internet. Assez incroyable de voir que ces gens qui n’ont pas grand chose possèdent un ordinateur dernier cri et l’ADSL ! Quelques mails pour mes parents, histoire de fixer définitivement notre point de rendez-vous en Slovaquie. Puis je repars enfin. Les au revoir à cette grande famille sont interminables et mon retard s’accroît d’autant. Le problème, c’est que l’après-midi le vent se lève toujours. Et aujourd’hui, c’est démentiel !
Je roule 30 km de plus à travers les champs pour atteindre Heves, belle bourgade de campagne, somme toute assez ordinaire. L’hospitalité n’est pas au menu du jour et je me résous à dormir dans un abri de la gare routière. Le gardien de nuit m’aperçoit et il me propose une salle d’attente fermée et chauffée. C’est toujours mieux que de rester dehors.

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La vie, c'est comme une bicyclette, il faut avancer pour ne pas perdre l'équilibre.
Albert Einstein.

La jeunesse est une victoire du goût de l'aventure sur l'amour du confort.
Douglas MacArthur.

C’est la contemplation silencieuse des atlas, à plat ventre sur le tapis, entre dix et treize ans, qui donne ainsi l’envie de tout planter là. Songez à des régions comme le Banat, la Caspienne, le Cachemire, aux musiques qui y résonnent, aux regards qu’on y croise, aux idées qui vous y attendent… Lorsque le désir résiste aux premières atteintes du bon sens, on lui cherche des raisons. Et on en trouve qui ne valent rien. La vérité, c’est qu’on ne sait comment nommer ce qui vous pousse. Quelque chose en vous grandit et détache les amarres, jusqu’au jour où, pas trop sûr de soi, on s’en va pour de bon.
Un voyage se passe de motifs. Il ne tarde pas à prouver qu’il se suffit à lui-même. On croit qu’on va faire un voyage, mais bientôt, c’est le voyage qui vous fait, ou vous défait.
Nicolas Bouvier.
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