
Je suis donc à quelques kilomètres à peine de Gênes. Pourtant la pluie me bloque toujours sur place. Je m’installe dans un chapiteau pour écrire mon journal en attendant que la pluie cesse. Peine perdue pour ce matin, le vent fait aussi son apparition. C’est de pire en pire. Heureusement que la nuit a été agréable bien à l’abri dans le camion. Tous les techniciens du cirque s’affairent autour des installations. Mais chacun vient me demander quelques informations sur mon voyage. Les conversations sont chaotiques, mais sympathiques. Mais moi, ce qui me préoccupe, c’est de reprendre la route. Je guette la moindre éclaircie. A 11h toujours rien, mais l’envie de partir est trop forte. Je m’habille en total water proof, salue une dernière fois les membres du cirque Martini et je me lance malgré les quelques gouttes. Un peu frisquet au départ, puis très vite trop chaud : c’est l’étuve là-dedans. J’entre dans Gênes assez facilement malgré la circulation très dense. Ma halte à la bibliothèque de Vidauban m’avait permis d’étudier un peu les monuments de la ville. C’est vraiment superbe même sous la pluie. Tous les bâtiments anciens ont de belles colonnes et des façades en pierres blanches et grises ou saumon. Cela donne une unité au centre historique, ça valait vraiment le coup de braver la pluie. Pour sortir de Gênes, je continue le long de la côte sur la « via Aurélia » Le temps semble se calmer un peu et la pluie a cessé. J’en profite pour une séance de déshabillage, séchage..
Arrivé à Sori à 15 km de là, j’aperçois enfin la péninsule de Portofino et ses 610m. Je réalise tout de suite que ça ne va pas être de la tarte. Devant moi se dresse une immense barre rocheuse et ma route semble bien passer au milieu de ce haut promontoire boisé. J’économise mes forces jusqu’à Camogli. Là, la route me surprend un peu, je descends jusqu’au niveau de la mer. Ensuite c’est une belle montée de 7 km qui vaut bien le « chevron » inscrit sur ma carte Michelin. Moi qui voulais économiser mon genou, c’est raté, il va falloir forcer un peu pour passer. C’est mon premier véritable col depuis la reprise et je n’ai plus l’habitude de rouler à ce rythme. Mais je trouve que je m’en sors plutôt bien à 8-9 km/h de moyenne. Je fais de nombreuses pauses pour reprendre mon souffle et je prends mon mal en patience. J’avais oublié cette sensation incroyable d’apprécier la vue qui s’amplifie mètre par mètre gravi. En haut, je suis même récompensé par un rayon de soleil. Je savoure cet instant. Pendant la descente, je freine continuellement parce que je suis glacé. Pour me réchauffer, la vue sur la baie de Santa Margherita. Sur les collines il y a d’innombrables petites maisons blanches disséminées dans cette étendue toute verte. En bas, une mer dans son immensité bleu-grise. Les petites embarcations des pêcheurs attendent paisiblement dans le port que leurs propriétaires les emmènent pour de nouvelles aventures.
Il est des instants et des lieux intemporels, comme si tout avait toujours été de la sorte depuis la nuit des temps.
A Portofino, le silence est un bien précieux que personne ne songe à gaspiller. Il se fait assez tard et je dois partir en laissant le port comme je l’ai trouvé. Je continue de longer la côte jusqu’à la nuit. A Lavagna, une tempête du 1er janvier 2010 a apporté des tonnes de sable sur la route que les bulldozers rendent à la plage par camions entiers.
Un peu plus de 50 km seulement et je dois arrêter, ça deviendrait dangereux de continuer dans la nuit. A Chiavari, je sonde la piscine, la mairie et l’église pour trouver un coin abrité et si possible chauffé pour passer la nuit. Bingo ! On me renvoie vers Cavi où il y a une association qui s’occupe des plus démunis et des pèlerins de passage. Quand j’annonce que je suis passé par Santiago et Fatima et que je vais à Rome, c’est limite si on ne me déroule pas le tapis rouge. L’association de la Casa Betania possède une belle maison où elle peut loger 4 personnes plus 2 bénévoles. Ce soir nous sommes 2 plus 2 et j’ai droit à une chambre particulière. Le repas est un moment d’échange très intéressant et aussi l’occasion pour moi de parfaire mon italien. Je fais le plein de calories, prends une bonne douche bien chaude et pars me réfugier au fond d’un lit moelleux. Pas si mal pour une journée de pluie ! C’est toujours la même rengaine : « aide toi le ciel t’aidera ! » Le coup de pouce de ce soir tombe à point nommé. demain, encore la montagne par le col de Bracco.
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