30 nov. 2009

Retour au pays




Pour la première fois depuis (… pfiou) bien longtemps, je prends mon temps avant de partir ce matin. Je n’ai qu’une cinquantaine de kilomètres pour atteindre la frontière autant dire une bagatelle. Je récupère cette route calme de la veille qui s’est transformée, l’espace d’une nuit, en podium pour défilés incessants de camions. Vive les dimanches ! Le plafond nuageux est assez bas et je n’aperçois plus les beautés du paysage entrevues hier. J’entre dans Figueres, et rempli ma mission emplettes. Je m’arrête également quelques instants en plein centre-ville pour sentir l’atmosphère de la ville mais tout est trop agité. Je repars sur ma nationale en direction de Llança et de la côte. Le monastère de San Pere de Rodes me salue de ses hauteurs et je plonge vers la mer. La côte de rochers est très jolie et le soleil illumine les caps qui se succèdent. Je redescends vers Port-Bou et sa gare impressionnante comparée à la taille de la ville puis entame ma dernière ascension espagnole. Au sommet il y aura la frontière, la France ! Concentré dans l’effort, je m’étonne de ne pas être plus affecté que cela à l’idée de quitter l’Espagne, après toutes ces aventures. Arrive déjà le poste frontière, (je monte désormais toutes ces cotes sans forcer à tel point que j’arrive à m’étonner moi-même). Je fais quelques photos, ravi de retrouver mes terres. Puis je me retourne pour entr’apercevoir une dernière fois ces contrées espagnoles qui m’ont tant apporté. Et d’un coup, d’un seul, tout explose dans ma tête. Une violente vague de souvenirs tous azimuts se bousculent, les 7000km défilent dans ma tête, du pont d’Irun à mon entrée, à ces caps rocailleux en passant par les panoramas de la côte basque mêlant si harmonieusement mer et montagne, les vallées verdoyantes de Cantabria, la barrière noire des Asturies, l’ambiance magique de St-Jacques et du cap Fisterra, les déserts andalous, la déception de Gibraltar puis l’émerveillement des hauteurs des Sierras, les barrages époustouflants de Guadalhorce et d’Iznajar, les champs d’oliviers, puis d’orangers, les souvenirs barcelonais, les contreforts pyrénéens… Et puis tous ces visages qui me restent gravés dans le cœur, les accueils formidables, les questions des enfants… Je pleure à chaudes larmes et j’aurai pu resté planté là longtemps dans cette torpeur nostalgique si un touriste ne m’avait pas demandé interpellé pour savoir si j’allais bien. Je le rassure. La page se tourne.
Et c’est finalement sourire aux lèvres que je redescends vers Cerbère dont la gare n’a rien à envier à celle de Port-Bou. Explication : les largeurs des rails espagnols et français sont différentes donc jusque dans les années 1970, il fallait transférer les marchandises d’un wagon à l’autre pour continuer le transport de l’autre coté de la frontière. Pas de bol pour les Français qui devaient transférer des oranges, opération minutieuse réalisée à la main pour ne pas abîmer les fruits !
J’appelle ma maman, sa voix me réchauffe le cœur et ma sieste au soleil est comme une immersion dans un océan de sérénité. C’est bon de se sentir chez soi ! En plus ce soir, j’ai un pied à terre chez ma nourrice lorsque j’étais bébé. C’est chez son fils Patrick que je me rends. Je finis de remonter la belle côte de Banyuls, Collioure et Argelés où les versants recouverts de vignes jaunies par l’automne luisent face à la mer bleue azur. Patrick et Josiane m’accueillent avec un enthousiasme débordant (d’autant plus que je me pointe complètement à l’improviste 20ans après notre dernier contact). Quel générosité dans cette famille. Nous retrouvons ma fameuse « Nounou » et son mari Francis et égrainons les souvenirs du passé. Impression d’être des amis de toujours. Une bonne douche bien chaude, un bon repas nourrissant puis une nuit dans un lit moelleux, la journée est complète. Quel bonheur d’être ici, c’est comme une renaissance.

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La vie, c'est comme une bicyclette, il faut avancer pour ne pas perdre l'équilibre.
Albert Einstein.

La jeunesse est une victoire du goût de l'aventure sur l'amour du confort.
Douglas MacArthur.

C’est la contemplation silencieuse des atlas, à plat ventre sur le tapis, entre dix et treize ans, qui donne ainsi l’envie de tout planter là. Songez à des régions comme le Banat, la Caspienne, le Cachemire, aux musiques qui y résonnent, aux regards qu’on y croise, aux idées qui vous y attendent… Lorsque le désir résiste aux premières atteintes du bon sens, on lui cherche des raisons. Et on en trouve qui ne valent rien. La vérité, c’est qu’on ne sait comment nommer ce qui vous pousse. Quelque chose en vous grandit et détache les amarres, jusqu’au jour où, pas trop sûr de soi, on s’en va pour de bon.
Un voyage se passe de motifs. Il ne tarde pas à prouver qu’il se suffit à lui-même. On croit qu’on va faire un voyage, mais bientôt, c’est le voyage qui vous fait, ou vous défait.
Nicolas Bouvier.
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