26 oct. 2009

Le bout du chemin


Difficile en effet une dernière fois de traverser la ville sans un pincement au cœur. Mes pneus heurtent les pavés disjoints et me font sangloter. On s’habitue très vite au confort de la sédentarité et les journées de reprises sont souvent difficiles physiquement et psychologiquement. Celle-ci doit m’emmener jusqu’au cap Finistère, jusqu’au bout du chemin, jusqu’au bout de la terre. Encore une étape lourde de symboles. Le soleil est de la partie, il paraît même que ça va aller de mieux en mieux au niveau météo. Par contre les montées de Buxantes ne sont pas de tout repos. Je démarre par 7km d’ascension dans les dix premiers kilomètres, de quoi vous coupez les jambes pour le reste de la journée. Mais comme d’habitude, la récompense est au sommet, la vue sur les monts alentours et les retenues d’eau est très appréciable. Dommage que la brume a tout de même du mal à se lever.
A 15h j’en trouverai encore des résidus sur certaines hauteurs du Finistère. Arrivé à midi à Dumbria, j’entre définitivement dans le territoire magique. Je retrouve la mer que je n’ai plus vue depuis une semaine et qui me manquait terriblement. Pour nos retrouvailles, elle s’est parée d’une robe bleue azur qui scintille au soleil. Comme si elles voulaient se rapprocher encore un peu plus de moi, les vagues viennent frapper les rochers de granit rose au pied des falaises. La lande observe le spectacle depuis les hauteurs et me délivre un parfum délicieux. Il y a en effet de grandes similitudes que j’ai perçues entre les deux Finistères : la mer, la roche, la végétation, cette impression de bout du bout de tout.
Bientôt je me débarrasse des pentes des falaises et file droit vers le cap. Plus de voiture, plus de camion, plus de maison, plus rien que la route et la nature à l’état pur.
Lorsque j’arrive près du phare, le ciel, la terre et la mer se confondent dans une brume claire et illuminée de soleil. L’instant est magique, indescriptible par des mots. Il ya une dizaine de pèlerins qui comme beaucoup prolongent un peu le rêve jusqu’ici. Aucun ne prononce le moindre mot. Nous sommes tous subjuguée par le final majestueux que le chemin nous a réservé. Je reste de longues heures assis au soleil à contempler le spectacle, mais aussi parce que j’ai quelques troubles stomacaux. N’ayant pas trouvé de semoule à Santiago, j’ai pensé la remplacer par des pois chiches, mais un repas complet de pois chiches, c’est très indigeste. Dans les jours suivants, j’ai eu encore quelques soucis intestinaux et tous les désagréments qui vont avec. Globalement, c’est sous contrôle. Les pois chiches sont remisés au fond des sacoches. Je passerai quand même une belle nuit près de l’église du 12ème siècle de Fisterra. Encore un lieu de bivouac magique.

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La vie, c'est comme une bicyclette, il faut avancer pour ne pas perdre l'équilibre.
Albert Einstein.

La jeunesse est une victoire du goût de l'aventure sur l'amour du confort.
Douglas MacArthur.

C’est la contemplation silencieuse des atlas, à plat ventre sur le tapis, entre dix et treize ans, qui donne ainsi l’envie de tout planter là. Songez à des régions comme le Banat, la Caspienne, le Cachemire, aux musiques qui y résonnent, aux regards qu’on y croise, aux idées qui vous y attendent… Lorsque le désir résiste aux premières atteintes du bon sens, on lui cherche des raisons. Et on en trouve qui ne valent rien. La vérité, c’est qu’on ne sait comment nommer ce qui vous pousse. Quelque chose en vous grandit et détache les amarres, jusqu’au jour où, pas trop sûr de soi, on s’en va pour de bon.
Un voyage se passe de motifs. Il ne tarde pas à prouver qu’il se suffit à lui-même. On croit qu’on va faire un voyage, mais bientôt, c’est le voyage qui vous fait, ou vous défait.
Nicolas Bouvier.
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