28 févr. 2010

Adieu l’Albanie et bienvenue en Grèce


Le petit déjeuner est gargantuesque, rien de tel pour me permettre d’affronter sévèrement la journée qui m’attend. Nicoletta tient à me présenter sa famille et ses amis qui vivent non loin dans le quartier. Elle m’offre quelques victuailles énergétiques pour la route, puis m’accompagne à vélo jusqu’à la sortie de la ville. Les aux revoirs sont déchirants tant la communion entre nous a été forte. Nicoletta m’a nourri, logé, soigné avec l’attention d’une mère. Elle m’a bordé lorsque j’ai été me coucher et a eu constamment le souci que je ne manque de rien. Cette femme a été formidable. Je parcours la partie Sud Est de la plaine de Korce en longeant de belles montagnes enneigées qui forment le massif du Devoll. La rivière du même nom, m’ouvre un passage plein est vers Bilisht. Cette vallée est très belle, encaissée entre les montagnes. On y cultive un peu de céréales. A Bilisht, ça monte un peu au milieu de belles collines. Normal je me dirige vers un poste frontière. Je croise quelques enfants qui me saluent et qui semblent vivre dans une misère extrême. Je leur donne le chocolat que m’a offert Nicoletta ce matin. La lueur dans leurs yeux me touche au plus profond de mon cœur. C’est un dernier geste envers cette Albanie qui m’aura conquis par sa nature splendide et par sa bonne humeur éternelle. Le douanier albanais me félicite pour mon voyage et se satisfait que mes étapes albanaises se soient bien passées. Côté grec par contre c’est une autre histoire…La douanière m’aborde et me pose mille questions sur mon voyage. Je suis assez habitué au mutisme des douaniers pour trouver ça louche. Je crois qu’elle cherche à me jauger pour savoir exactement de quoi il retourne. Sans scrupule, je lui débite tous les clichés sur le cyclotourisme qu’ils soient véridiques ou non. Pour finir elle me conseille sur la route en m’indiquant qu’en bas de la descente, il faudra prendre à droite au niveau du poste de police des frontières. Peut-être vont t’ils vous contrôler…Cette dernière phrase est longue de sens pour moi. En bas de la belle descente au milieu de jolies collines boisées, un fourgon de police me fait signe de me ranger sur le côté. Visiblement, il y a des tampons qui divergent sur mon passeport. On me fait déballer une sacoche, celle aux vêtements, puis visiblement je suis crédible à leurs yeux dans la peau du voyageur au long cours. Alors on me laisse continuer. Super accueil dans l’espace Schengen et la zone euro !
La route est superbe au milieu de ces montagnes abruptes dont la limite de neige n’est pas loin. De grandes forêts de sapins couvrent les pentes. D’après les panneaux, il y a quelques ours qui rodent dans le coin. Pas de quoi m’affoler ! Ce sont plutôt les chiens qui me causent du souci. A mon passage, ils grognent et me coursent sur plusieurs centaines de mètres, en me barrant parfois le passage. Après le village d’Antartiko, je suis assailli par une meute de 6 ou 7 bestiaux qui veulent visiblement en découdre. Je roule au sprint, mais ils sont également très rapides. Il y en aura même un qui testera ses canines sur mes sacoches. Ils lâcheront prise après 500m de frayeur intense !! Tout ça au pied d’un col avec 20 km d’ascension avec des pentes délirantes. Tout est enneigé dans la montagne, mais ma route continue de grimper encore et encore. Je ne sais pas combien de fois j’ai eu à m’arrêter pour pousser le vélo. Après deux heures d’effort, j’arrive au sommet. J’entends de la musique au bar d’altitude, puis tombe des nues lorsque je découvre de belles pistes de ski avec télésiège et tout l’attirail d’une station de sport d’hiver. Les skieurs sont un peu médusés de voir débarquer un cycliste ici et en cette saison. Alors qu’ils sont vêtus de leur grosses combinaisons, je suis juste avec mon coupe vent car les efforts de l’ascension m’ont fait surchauffer ! Je me rhabille chaudement pour profiter de la descente. Magnifique, d’abord dans la forêt puis sur des pentes dégagées qui m’offrent un panorama grandiose sur ces hautes montagnes enneigées et sur la belle plaine de Florina à 660m. Je vais découvrir que j’ai grimpé à plus de 1000m d’altitude. Je continue un peu dans la vallée et rejoins le village d’Annochoru. L’accueil des habitants est on ne peut plus froid, personne ne s’intéresse à moi, ni ne consent à m’aider pour quoi que ce soit. Il va faire froid cette nuit et ça ne m’arrange pas, mais je trouve un bon abri au niveau de l’église du village. Puis Vassilis m’aborde, il a entendu parler de moi par d’autres personnes que j’ai croisées dans le centre. Alors il est parti à ma recherche car il peut me proposer une belle cabane aménagée au milieu de son exploitation agricole. La cabane est parfaite, il y a un lit et une petite cuisine. Vassilis s’excuse qu’il n’y ait pas d’eau. Aucun problème pour moi. Alors que je suis sur le point de me préparer à manger, il revient avec des victuailles, du pain, des frites et de la viande pour ce soir et un croissant et des fruits pour demain matin. Que demander de plus ! Je le remercie chaudement, puis vais me coucher de bonne heure. Ce col m’a épuisé.

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La vie, c'est comme une bicyclette, il faut avancer pour ne pas perdre l'équilibre.
Albert Einstein.

La jeunesse est une victoire du goût de l'aventure sur l'amour du confort.
Douglas MacArthur.

C’est la contemplation silencieuse des atlas, à plat ventre sur le tapis, entre dix et treize ans, qui donne ainsi l’envie de tout planter là. Songez à des régions comme le Banat, la Caspienne, le Cachemire, aux musiques qui y résonnent, aux regards qu’on y croise, aux idées qui vous y attendent… Lorsque le désir résiste aux premières atteintes du bon sens, on lui cherche des raisons. Et on en trouve qui ne valent rien. La vérité, c’est qu’on ne sait comment nommer ce qui vous pousse. Quelque chose en vous grandit et détache les amarres, jusqu’au jour où, pas trop sûr de soi, on s’en va pour de bon.
Un voyage se passe de motifs. Il ne tarde pas à prouver qu’il se suffit à lui-même. On croit qu’on va faire un voyage, mais bientôt, c’est le voyage qui vous fait, ou vous défait.
Nicolas Bouvier.
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