Je reprends ma route ce matin et les indications de l’agriculteur d’hier me sont précieuses pour sortir de ce labyrinthe d’orangers. Je vais voir sans doute aujourd’hui plus d’oranges et de mandarines que pendant tout le reste de ma vie. Il y en a tout le long du parcours. La route est très agréable, elle longe le canal d’irrigation sur une belle piste cyclable. Mais je dois la quitter à Betera pour bifurquer plein Nord. Pendant encore dix kilomètres, ce sont des orangers à perte de vue, entrecoupés par quelques petits villages. Cette région doit nourrir le monde en oranges, les quantités de fruits sont incroyables. Et pour moi, il suffit de se servir. Je ne boirai pas une goutte d’eau de tout le trajet. Dès que j’ai soif, je m’arrête, je cueille un fruit et le mange ! Mais arrive tout de même le col de Serra, 8km d’ascension que je grimpe encore avec une fraîcheur incroyable. Je double même deux cyclistes en vélos de route qui me regardent passer, pleins de dépit ! Je réalise pleinement la condition physique que ce voyage me procure. C’est probablement mon dernier col et dans la descente, je profite du moment et les effluves des pins me montent à la tête. Je contemple le paysage avec une joie infinie. Arrivé en bas, je fais une petite pause mandarines. Un cycliste s’arrête, c’est un sourd et muet. Il me fait signe que les mandarines sont délicieuses et que je peux en prendre autant que je veux. Moi qui ai pas mal développé ma gestuelle faute de vocabulaire espagnol et lui qui me parle en langage des signes, on se comprend plutôt bien. L’échange dure un certain temps et est très beau. Il me fait un signe de croix ainsi qu’à mon vélo, puis m’offre la croix qu’il porte autour cou. C’est un geste que je n’oublierai jamais, car il est d’une sincérité simple et intense. Je garde sa croix en priant pour qu’elle me protège tout au long de mon chemin. Lui entame son ascension, il a prévu de grimper 3 fois le col à vélo ce matin et un fois à pied cet après midi ! Un peu plus loin, je me retrouve abrité du vent par un groupe de vététistes. On échange quelques mots et j’en profite pour me reposer un peu les mollets. Autour de nous, les orangers ont à nouveau rempli le décor. Je traverse Villa Réal et Castillo sans le moindre château, pourtant je suis arrivé plein sud, passé par le « rotondo centro » et sorti plein nord pas un panneau indiquant le château, tant pis. J’attrape la N340 et je vais la suivre un bon moment dans les jours à venir. C’est la route qui longe la côte. Mais un peu avant Benicassim, je tombe sur un petit ermitage au milieu des orangers. J’ai déjà 120 km au compteur et même s’il n’est qu’à peine 16h, je m’arrête pour aujourd’hui. Sur la côte touristique, je ne suis pas sûr de trouver un endroit pour dormir. Je me gave encore de mandarines, puis je me couche à l’abri de la chapelle. Tout est paisible.
25 nov. 2009
Au milieu des oranges
Je reprends ma route ce matin et les indications de l’agriculteur d’hier me sont précieuses pour sortir de ce labyrinthe d’orangers. Je vais voir sans doute aujourd’hui plus d’oranges et de mandarines que pendant tout le reste de ma vie. Il y en a tout le long du parcours. La route est très agréable, elle longe le canal d’irrigation sur une belle piste cyclable. Mais je dois la quitter à Betera pour bifurquer plein Nord. Pendant encore dix kilomètres, ce sont des orangers à perte de vue, entrecoupés par quelques petits villages. Cette région doit nourrir le monde en oranges, les quantités de fruits sont incroyables. Et pour moi, il suffit de se servir. Je ne boirai pas une goutte d’eau de tout le trajet. Dès que j’ai soif, je m’arrête, je cueille un fruit et le mange ! Mais arrive tout de même le col de Serra, 8km d’ascension que je grimpe encore avec une fraîcheur incroyable. Je double même deux cyclistes en vélos de route qui me regardent passer, pleins de dépit ! Je réalise pleinement la condition physique que ce voyage me procure. C’est probablement mon dernier col et dans la descente, je profite du moment et les effluves des pins me montent à la tête. Je contemple le paysage avec une joie infinie. Arrivé en bas, je fais une petite pause mandarines. Un cycliste s’arrête, c’est un sourd et muet. Il me fait signe que les mandarines sont délicieuses et que je peux en prendre autant que je veux. Moi qui ai pas mal développé ma gestuelle faute de vocabulaire espagnol et lui qui me parle en langage des signes, on se comprend plutôt bien. L’échange dure un certain temps et est très beau. Il me fait un signe de croix ainsi qu’à mon vélo, puis m’offre la croix qu’il porte autour cou. C’est un geste que je n’oublierai jamais, car il est d’une sincérité simple et intense. Je garde sa croix en priant pour qu’elle me protège tout au long de mon chemin. Lui entame son ascension, il a prévu de grimper 3 fois le col à vélo ce matin et un fois à pied cet après midi ! Un peu plus loin, je me retrouve abrité du vent par un groupe de vététistes. On échange quelques mots et j’en profite pour me reposer un peu les mollets. Autour de nous, les orangers ont à nouveau rempli le décor. Je traverse Villa Réal et Castillo sans le moindre château, pourtant je suis arrivé plein sud, passé par le « rotondo centro » et sorti plein nord pas un panneau indiquant le château, tant pis. J’attrape la N340 et je vais la suivre un bon moment dans les jours à venir. C’est la route qui longe la côte. Mais un peu avant Benicassim, je tombe sur un petit ermitage au milieu des orangers. J’ai déjà 120 km au compteur et même s’il n’est qu’à peine 16h, je m’arrête pour aujourd’hui. Sur la côte touristique, je ne suis pas sûr de trouver un endroit pour dormir. Je me gave encore de mandarines, puis je me couche à l’abri de la chapelle. Tout est paisible.
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06 - Espagne suite
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La vie, c'est comme une bicyclette, il faut avancer pour ne pas perdre l'équilibre.
Albert Einstein.
La jeunesse est une victoire du goût de l'aventure sur l'amour du confort.
Douglas MacArthur.
C’est la contemplation silencieuse des atlas, à plat ventre sur le tapis, entre dix et treize ans, qui donne ainsi l’envie de tout planter là. Songez à des régions comme le Banat, la Caspienne, le Cachemire, aux musiques qui y résonnent, aux regards qu’on y croise, aux idées qui vous y attendent… Lorsque le désir résiste aux premières atteintes du bon sens, on lui cherche des raisons. Et on en trouve qui ne valent rien. La vérité, c’est qu’on ne sait comment nommer ce qui vous pousse. Quelque chose en vous grandit et détache les amarres, jusqu’au jour où, pas trop sûr de soi, on s’en va pour de bon.
Un voyage se passe de motifs. Il ne tarde pas à prouver qu’il se suffit à lui-même. On croit qu’on va faire un voyage, mais bientôt, c’est le voyage qui vous fait, ou vous défait.
Nicolas Bouvier.
Albert Einstein.
La jeunesse est une victoire du goût de l'aventure sur l'amour du confort.
Douglas MacArthur.
C’est la contemplation silencieuse des atlas, à plat ventre sur le tapis, entre dix et treize ans, qui donne ainsi l’envie de tout planter là. Songez à des régions comme le Banat, la Caspienne, le Cachemire, aux musiques qui y résonnent, aux regards qu’on y croise, aux idées qui vous y attendent… Lorsque le désir résiste aux premières atteintes du bon sens, on lui cherche des raisons. Et on en trouve qui ne valent rien. La vérité, c’est qu’on ne sait comment nommer ce qui vous pousse. Quelque chose en vous grandit et détache les amarres, jusqu’au jour où, pas trop sûr de soi, on s’en va pour de bon.
Un voyage se passe de motifs. Il ne tarde pas à prouver qu’il se suffit à lui-même. On croit qu’on va faire un voyage, mais bientôt, c’est le voyage qui vous fait, ou vous défait.
Nicolas Bouvier.

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