Si tout se passe bien aujourd’hui, j’atteindrai le Portugal ! Troisième pays sur mon itinéraire. Mais tout ne s’est pas bien passé et je n’ai pas atteint le Portugal …Il me reste une dizaine de kilomètres pour arriver à Pontevedra, mais à 8H30 c’est le bordel monstre pour entrer dans la ville, une file continue de voitures et camions me chahute depuis le départ et j’ai le plus grand mal à trouver mon chemin dans ce labyrinthe d’autovias et autopistas interdites aux vélos. J’arrive finalement tant bien que mal à m’extraire mais le retard m’oblige à zapper la pointe de Cangos pour filer vers Vigo. Pas de chance aujourd’hui, je casse le câble qui retient ma sacoche de guidon. C’est vrai qu’elle s’est fortement alourdie depuis le départ : tiens ça c’est bien de l’avoir sous la main et hop dans la sacoche de guidon. Et puis les dos d’ânes en bas de chaque descente depuis la frontière, pas étonnant qu’elle me lâche. Réparation avec un cable de frein, ça tient très bien, je repars avec cette fois beaucoup de retard….
La nationale de Pontevedra et Vigo, puis Baiona est assez jolie et je retrouve vite ma bonne humeur en découvrant la baie de Redondela. Là j’ai deux options : ou bien je continue sur une nationale sans intérêt vers Tui et j’atteins la frontière avant ce soir ou bien je prends dans Vigo, puis Baiona pour suivre la belle côte de rochers que l'on m’a recommandée à Fisterra. Je demande confirmation que le pont vers le Portugal est accessible en vélo, c’est OK ! ça sera donc par la côte, je ne vais pas me priver d’un site magnifique parce qu’un abruti a décidé que l’on changeait de pays à 10 km près. Je m’extirpe donc de l’échangeur à Redondela, quand, au sommet de la côte, sans vraiment comprendre pourquoi ni comment je me retrouve violemment plaqué au sol. Le choc est soudain et brutal. Je réalise que je viens d’être percuté par un camion . Juste quand je commençais à penser que la réputation des routiers espagnols était très sévère…
Déjà je suis conscient, je peux bouger les bras et les jambes. A ce moment j’ai surtout peur de m’être cassé le poignet... ils bougent bien tous les deux ! C’est un miracle, je suis indemne ! Je vais pour me relever, mais déjà une main est posée sur mon buste et l’on m’en empêche.
La police de la ville circulait par là (c’est devant un collège) et a vu l’accident. On appelle les secours. Les pompiers arrivent en 3mn (je verrai par la suite que la caserne est à 500m) On me fait un check-up en version mime puisque l’on ne parle pas la même langue. On me désinfecte les plaies au genou et à la hanche. C’est vraiment trois fois rien : je suis béni. merci mon dieu . Il continue de me protéger ! Je donne mes papiers, remplis des formulaires en tout genre, etc…
Ce qui m’inquiéte alors, c’est l’état de mon vélo. La sacoche de guidon a volé, normal vu ma réparation de ce matin, mais j’ai peur d’avoir une roue voilée. Je l'inspecte avec les pompiers et la roue avant a pris un léger voile, mais rien de bien méchant. La roue arrière frotte fortement sur le patin de frein, mais elle semble tourner rond. On règle les freins, ils m’amènent à la caserne pour discuter et boire un café. Ils sont vraiment sympas et me persuadent que j’ai eu beaucoup de chance. Ca devait finir par arriver et à choisir, toutes les conditions étaient réunies pour que ça se passe sans trop de frais. Je roulais à 10km/h, le camion démarrait tout juste. J’aurai pu arriver à fond en bas d’une descente et lui, tourner en venant d’en face. Je suis indemne c’est un moindre mal ! Mon casque a quand même gardé une trace preuve qu’il m’aura été utile. Je ne roule jamais sans, jamais, jamais même dans les cols quand la chaleur m’accable, jamais et maintenant je saurai dire pourquoi. Je repars donc sans véritablement réaliser. Arrivée à Baiona, j’ai quand même besoin de reprendre mes esprits, je me pose faire une lessive et me douche sur la plage. Je prends conscience petit à petit d’être passé proche du drame. Je reprends le long de la côte sur une belle piste cyclable. Le décor est en effet superbe : la côte et ses rochers de granit roses à ma gauche, les monts Alhaya boisés en bas et rocailleux aux sommets, le ressac des vagues et la lumière rasante qui embrase l’océan. Le vent du sud me force à m’arrêter à Oia dans un superbe monastère. Dans l’église, de vieilles femmes récitent des Santa Maria en flot continu face au chœur couvert d’icônes de la vierge dorée : c’est un spectacle impressionnant. En me couchant près du monastère je réalise un peu mieux l’évènement de la journée. Je réalise que Dieu m’a protégé, qu’il a entendu mes prières à Santiago. J’implore longuement sa protection et s’il me fallait une preuve de sa présence, désormais je l’ai. En réalité je sens sa présence chaque jour depuis le départ, depuis que j’ai su faire le silence dans ma tête. Depuis la première semaine j’ai souvent demandé qu’il me protège dans les églises que j’ai croisées sur mon parcours et j’ai fini par sentir sa présence comme une main protectrice sur mon épaule, comme l’approbation d’un père envers son fils. Je ne peux rien dire de plus, je sentais simplement son amour ni plus ni moins. Je ne dirais pas qu’il m’a donné une force particulière, ni orienté en quelconque direction, je sens simplement qu’il est là à mes côtés. Et en échangeant avec tous les pèlerins de Santiago, ce sentiment s’est encore renforcé. Aujourd’hui il m’a fait signe, il m’a sauvé. Merci mon Dieu. Protège moi seigneur. Epargne le souci à ceux qui me sont chers. Voilà la litanie que je lui prie tous les jours. Puisque ce journal est le lieu de tout raconter, je ne pouvais plus omettre cette part si importante désormais dans mon voyage…

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