4 nov. 2009

Pèlerinage et réconfort





Aujourd’hui la distance sera courte car j’ai un point de chute dans la région d’Alcobaça seulement 80 km. Cela me laissera du temps pour visiter. Je décide tout de même de partir de bonne heure car le temps pourrait se dégrader dans la journée. Il a plu toute la nuit, mais au petit matin, ce sont les éclaircies qui prédominent. Pour rejoindre Fatima, il y a 36 solutions, il faut monter quelque soit le côté choisi. Les chevrons de la carte m’attendent de pied ferme. Et ça démarre très vite, dès le deuxième kilomètre un col m’emmène très haut au dessus de la vallée d’Espite. Ce sera mon chemin de croix pour atteindre le sanctuaire, les 20 km qui m’en séparent sont une véritable torture avec plusieurs pentes au delà de 15%. Je mets pied à terre quatre fois en dix kilomètres alors que cela ne m’était pas arrivé depuis 2000 km. Mais une fois le sanctuaire atteint, toutes mes douleurs s’envolent comme aspirées par un souffle divin. La majestuosité du lieu me laisse bouche bée. Il y a là une quiétude sans pareille, tout est calme et volupté. Les passants semblent dessiner une chorégraphie orchestrée et minutieusement paramétrée pour animer le lieu sans le dénaturer. Un sentiment très spécial m’envahit, celui d’être à ma place, assis sur un banc de la grande cathédrale. Le soleil brille et ses reflets sur les statues recouvertes d’or m’éblouissent.
« May peace prevail on Earth » Fatima cité de la paix 2009.
Le temps est comme arrêté, mon esprit vidé, une sensation de détachement des éléments : plus d’espace, plus de temps, plus de matière et seulement une sensation de bien être. Je sors doucement de mon état second et reprends mes esprits après de longues minutes. Je dois quitter ce lieu magique et mystique pour poursuivre vers mon point de chute. En descendant la montagne de l’autre côté, j’hésite d’abord à contourner Batalha, mais un logo de l’Unesco me persuade finalement d’aller jeter un coup d’œil. Au détour d’un virage, la claque…Un monastère du XIV siècle en parfait état de conservation me saute au visage . Il a été construit pour célébrer la victoire Portugaise sur l’armée Espagnole pourtant deux fois supérieure en nombre. Les voûtes sont ciselées d’une finesse incroyable qu’on y croirait de la dentelle. Le niveau de détail des décorations est tel qu’il est impossible à décrire d’un bloc. Le cloître est une merveille de quiétude entouré de colonnes torsadées…Si Fatima a la grandiosité du volume, Batalha à la finesse du détail et l’appui de l’histoire. Un lieu immanquable pour celui qui prétend vouloir visiter le Portugal. Je poursuis ma route un peu chamboulé par ces découvertes architecturales de la matinée. J’espère arriver bientôt dans le centre d’Alcobaça et là rebelote, alors que je pensais en avoir ma dose pour la journée, voilà qu’on me ressert un monastère du même calibre que le précédent, la légende en plus. Pedro prince portugais aime Inès, mais est promis à une princesse britannique. Bafouant l’ordre établi pour lui Pedro rejette la noble pour épouser la roturière de son cœur. Fou de rage, son père, le roi des Portugais fait assassiner la dulcinée, espérant ainsi remettre son fils dans le droit chemin. Pedro effondré repart se morfondre en ermite. A la mort de son père, il récupère le corps de la défunte et l’installe à ses côtés sur le trône du Portugal. Désormais tous les deux sont réunis dans des tombeaux merveilleusement ornés trônant dans le transept du monastère cistercien dont la rigueur architecturale élance voûtes et ogives très haut dans le ciel bleu d’Alcobaça.
Je profite de la magie du lieu pour m’assoupir. Il me reste 20 km pour rejoindre Funqueira et le Patio do Vale où je dois rencontrer des amis de la famille. Le relief ici est sans pitié et je préfère demander ma route à plusieurs reprises plutôt que de monter une côte pour rien. A 16h je suis arrivé à destination, les propriétaires sont sortis et j’en profite pour bricoler ma monture. Lorsqu’ils sont de retour, ils m’accueillent avec une énergie et une chaleur humaine rarement rencontrées. La chaleur portugaise puissance 1000. Une demi heure que je suis chez Aldy et Juan que déjà l’on me gave de spécialités locales : pains au chorizo, fruits, jus de fruits etc…Le goûter est déjà un banquet. Mais le repas du soir sera un festin pour mon estomac plus vraiment habitué à ce genre de traitement. Chorizo frit, feuilletés au fromage, à la viande, frites, champignons cueillis l’après midi même revenus délicatement à la poêle avec ail et fines herbes, fromage portugais, fruits secs et le tout arrosé de porto évidemment. Je sors de table avec l’estomac retourné et gavé comme une oie du Périgord. La lecture du guide du routard portugais et je m’enfonce dans le sommeil profond d’un lit moelleux. Le feu crépite encore dans la cheminée, la maison est calme, ma journée a été divine.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

La vie, c'est comme une bicyclette, il faut avancer pour ne pas perdre l'équilibre.
Albert Einstein.

La jeunesse est une victoire du goût de l'aventure sur l'amour du confort.
Douglas MacArthur.

C’est la contemplation silencieuse des atlas, à plat ventre sur le tapis, entre dix et treize ans, qui donne ainsi l’envie de tout planter là. Songez à des régions comme le Banat, la Caspienne, le Cachemire, aux musiques qui y résonnent, aux regards qu’on y croise, aux idées qui vous y attendent… Lorsque le désir résiste aux premières atteintes du bon sens, on lui cherche des raisons. Et on en trouve qui ne valent rien. La vérité, c’est qu’on ne sait comment nommer ce qui vous pousse. Quelque chose en vous grandit et détache les amarres, jusqu’au jour où, pas trop sûr de soi, on s’en va pour de bon.
Un voyage se passe de motifs. Il ne tarde pas à prouver qu’il se suffit à lui-même. On croit qu’on va faire un voyage, mais bientôt, c’est le voyage qui vous fait, ou vous défait.
Nicolas Bouvier.
Nombre de visites : compteur pour blog