3 oct. 2009

Vannes - Quimper




Départ de Vannes Lundi matin. Charlie me prodigue quelques indications pour traverser la ville mais j'ai perdu le rythme : je me galère pas loin d'une heure pour retomber sur l'itinéraire prévu. Vannes ne doit pas être réputée pour sa profusion de panneaux d'indications ou alors personne ne sort de la ville autrement que par la voie rapide... Mais qu'importe, le soleil brille toujours et j'ai plan de route pour Rochefort devrait me permettre de profiter un peu de la route (du moins c'est ce que je crois à ce moment là)...
Je sors donc tant bien que mal de la ville et pas vraiment sur la route prévue ce qui m'occasionne aussi de monter sur les hauteurs du Sud Morbihan encore embrumées alors que la chaleur commence déjà à plomber "la vallée bretonne". Un peu avant midi je traverse la Vilaine et quitte définitivement cette belle Bretagne avec un petit pincement au coeur. 15 jours déjà que j'y suis entré, 15 jours à travers campagnes et fronts de mer, plages et côtes sauvages, raidillons et descente. Je porte un autre regard sur cette région que je croyais connaître. Un pays riche de diversités et de cultures régionales fortement ancrées et surtout des sites naturels magnifiques, de Guerlédan à la pointe de Dinan, de Concarneau à la forêt de Paimpont. J'en saisis mieux la fragilité face aux enjeux de nos sociétés destructrices, les marées vertes, la pression immobilière sur les côtes, la disparition des ports de pêche en sont autant d'exemples flagrants...
L'étape de ce lundi m'amène donc en Loire Atlantique que je découvre d'abord par sa facette nature en traversant la grande brière, zone de marais où roseaux et caneaux se livrent une lutte territoriale sans merci. Et au milieu passe la route, d'une droiture et d'une platitude qui, en d'autres circonstances m'auraient certainnement dégoûté. Mais les montagnes russes à la sauce bretonne me permettent d'apprécier au centuple ce terrain roulant. Gros plateau, vent dans le dos, j'enroule le braquet à 30km/h avec Jean-Pierre en ligne de mire. Une fois revenu à sa hauteur les relais s'enchaînent jusqu'à Montoir-de-Bretagne où nous faisons connaissance sur une aire de pique-nique. Il est 15h30 et j'ai de l'avance sur mon itinéraire, je traverserai bien la Loire aujourd'hui. JP me convaint de prendre le pont de St-Nazaire, avec un vent de Nord : aucun danger ! En plus il y a une piste cyclable qui amène au pied du pont, c'est un jeu d'enfant, etc. Gonflé à bloc je me dirige vers le pont. Ca démarre mal, la fameuse piste cyclable est coupée, la passerelle qui passe au-dessus de la voie ferrée est en réfection. Demerden Sie sich pour rejoindre le pont ! Bon, entre navigation à la boussole dans la zone commerciale et le port, j'arrive finalement au pied du pont. Charlie m'avait prévenu que la piste cyclable n'était pas la plus sécuritaire qui soit et en voyant la bande de 40cm de large bordée d'un parapet de 50cm de haut et balayée par le souffle des 3,5t, ses propos prennent soudain un caractère un peu plus réel ! Je me lance finalement, les mollets gonflés à bloc et les sacoches rasant la bordure du trottoire. 5km de terreur, la tête gonflée par le brouhaha continuel, un petit bout d'enfer sur une allée de béton.
A peine arrivé en bas, je prends la première sortie et m'engouffre loin de ce cafarneum grouillant et la quiétude de la pointe de Mindin me saute aux oreilles. Tout paraît paisible, les pins ondulent sous la brise, ombrageant la plage d'un scintillement qui se révèle le parfait écho de la houle au soleil couchant ! (oui cette phrase a été construite avec le dictionnaire des synonyme Word) Bref c'est calme et c'est beau. Ca aurait comme un goût de vacances sur la cote mais sans touristes !
Je reprends doucement la route à la recherche d'un coin paisible pour dormir, quelque part sur la plage. St-Brévin-l'Océan, une dune abrittée du vent, le site est parfait, je me restaure de mes efforts de la journée et m'endors à même le sable, sous le ciel étoilé.

Le jour se lève et la nuit a été magnifique, bercé par le ressac, j'ai dormi comme un loir. Le vélo est juste tombé de sa béquille (normal dans le sable c'est pas terrible) et la chaîne est couverte de sable. C'est pas cool, ça crisse et j'ai l'impression de détruire ma transmission à chaque coup de pédale. Pause nettoyage indispensable ! Mais qu'importe, aujourd'hui je n'aurai pas à me soucier de l'orientation : longer la mer ! Et c'est encore plus facile, grace à l'excellent réseau de pistes cyclables Vélocéan qui longe le littoral sur tout le département. Le petit port de Préfailles et ses cabanes de pêcheurs, la cote sauvage de Pornic et son château Vauban, le marais de Bouin, autant de découvertes qui me ravissent l'esprit. La matinée est un régal et à midi je suis déjà à Beauvoir-sur-Mer.
A 16h30, je suis à Beauvoir-sur-Mer ! Et non cette fois je n'ai pas fait la sieste ! Explications : je veux voir ne serait-ce que de loin la presqu'île de Noirmoutier, ensuite il me suffit de couper à travers le marais pour rejoindre Fromentine et reprendre la belle voie cyclable. Un jeux d'enfants, mouais ! Couper à travers le marais... je me retrouve la roue avant à plat sur un chemin enpierré à la sauvage, large comme la moitié de mes sacoches, bordé de buissons épineux. La galère ! Vu l'avancement, plus la peine de faire demi-tour, je vois une route au loin mais toujours ce foutu canal qui m'empeche de la rejoindre. Après quelques kilomètres à pousser le vélo par crainte de crever à nouveau, le chemein s'élargit, j'apperçois enfin un pont, la délivrance ! La route me ramène à mon point de départ de l'après-midi : belle balade dans le marais ! Je roule 10km et stop, j'en ai marre ! Je me pose sans plus de question dans la forêt de St-Jean-de-Monts. Miam-Miam et Dodo !

Aujourd'hui, finies les conneries, l'expérience de la veille m'a suffit. Je suis la voie cyclable ! 20km plus loin, terreur ! "Vélocéan, fin de l'itinéraire" Et merde ! ils me lâchent comme ça au milieu de nulle part, je ne sais pas trop où je suis moi ! Faut que je rejoingne un bled pas trop loin, ca va recommencer comme hier, je vais me paummer dans les chemins... Et quelques mètres plus loin : "Bienvenue sur le réseau des voies cyclables du littoral" Trop cool ! Y'a même un plan ! Charlie avait raison, il suffit de suivre jusqu'à La Tranche. Et c'est ce que je fais ! Passage à St-Gilles-Croix-de-Vie, aux Sables-d'Olonne, à Jard-sur-Mer. A travers forêts de pins et dunes, la voie sillonne la côte, ses stations balnéaires et ses petits ports rescapés. Ca respire franchement les vacances, break de 11h sur les rochers, les pieds dans l'eau, pique-nique sur la plage, sieste à l'ombre de la dune... Le voyage prend tout son sens, je profite de chacun de ces instants comme s'il s'agissait du dernier rayon de soleil. Je quitte finalement l'océan, un peu à regrêts car il m'a offert de tellement beaux tableaux depuis une semaine. Et je rentre dans les terres pour amorcer mon virage vers le marais poitevin. La route et plate et mes muscles chauds, je décide de rallonger l'étape. Arrivé dans le marais, la crevaison de Noirmoutier se manifeste à nouveau, c'est le bordel avec les rustines, j'en colle une sur l'autre et encore un patch, bref c'est la loose de la réparation, je dois changer carrément la chambre à air. Je balle tout mon bardat, effectue l'opération et repars pour une grosse heure de vélo. Arrivé à 30km de là, je m'arrête sur la place du village et récupère un peu. Le village à l'air sympa, je m'arrêterais bien là pour la nuit. Je me repose, je bois un coup, etc... Et là c'est le drame ! Mais le MEGA DRAME ! Plus de sac banane ! Donc plus de passeport, plus de carte bleue, plus de liquide... Bref, plus de voyage ! Rien qu'à cette idée mon sang se glace instantanément. Bon, situation de crise = sang froid et rationnalisme ! Inspection des lieux : rien ! Dernier repérage de la cible : le changement de roue à Grues. Le jour commence à tomber, pas de temps à perdre. Là, un contre-la-montre de 30km, à 27-28km/h de moyenne s'engage sans vouloir céder à la panique. Je dois transformer ma hantise de voir mon voyage s'arrêter en energie positive pour relancer encore ! A la nuit tombée, j'arrive à Grues, les mollets crampés et les poumons en feux ! C'est le moment de vérité : TADADA...

DELIVRANCE, mon sac m'attend sagement sur le dossier du banc.

Je lève les yeux au ciel, merci mon Dieu ! Le voyage continue ! Le curé ferme son église et je le salue, il m'invite à passer la nuit dans l'église, harrassé, j'accepte sans hésiter et remercie chaudement le brave homme.

Après les péripéties de la veille, la journée d'aujourd'hui devrait être plus calme, il suffit de suivre les grandes directions La Rochelle puis Rochefort sur un terrain tout plat avec vent dans le dos... En partant, je croise un conseiller municipal qui me voit la banane autour de la taille ! C'est lui qui l'a repérée la veille et mise en évidence pour que son propriétaire la retrouve. Je salue son honnêteté et quitte ce brave village de campagne en saluant la bonté de ses habitants !
Le reste de l'étape est des plus classiques : de longues lignes droites, de belles églises, quelques jolis plages, un beau panorama sur l'île d'Aix et Oléron et Rochefort. Arrivée à destination.

Avec mes ennuis de la veille je n'ai pas pas pensé à confirmer mon arrivée. Qu'importe, ici la porte est toujours ouverte pour un brave neveu de passage. L'accueil est digne de mes espérances, je me requinque psychologiquement mais aussi physiquement ! Le profusion de glaces n'a d'égal que la tendresse du rosbeef...

En prime, un spectacle d'exception offert par ma tante en l'occasion d'un match d'impro face à une ligue quebecoise, comme un éclair de franche camaraderie au milieu d'un univers de solitude ! Pour le spéctacle : Merci !

Demain, direction Toulouse ! Si le soleil continue de se plaire dans mes sacoches, arrivée probable jeudi ou vendredi !


Bisous à tous ! Je pense beaucoup à vous et j'espère que je ne vous cause pas trop de mouron...

Aymeric

8 commentaires:

  1. waouh !! que d'aventures pendant ton récit...
    ça a l'air chouette la bretagne...
    Sinon l'épisode du sac banane m'a fait sourire, bon courage à toi !!
    et bonne route !!

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  2. tête en l'air !!!! j'espère que ça te servira de leçon !
    Je pense à toi tous les jours. T'as vraiment de la chance avec le temps.

    Bisous

    Julie

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  3. Bien lire les panneaux....quand ils sont présents, bien sur, lol.
    La Bretagne est si belle, la France est si belle, bonne route à toi.

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  4. Bon, on t'attend de pied ferme à Toulouse !
    Te crève pas trop non plus, tu as l'air de t'être un peu mis la pression pour le coup du sac banane ...
    En tout cas, j'espère que tu continueras de nous tenir au courant même si parfois ça risque d'être plus dur !
    A+,
    Bibi

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  5. Bienvenu au club des cycloguerrier qui ont franchis le pont de St-Nazaire sur les roues !! quand je te disai que c'était pas une promenade 3ème âge ^^

    Les pistes cyclables de Loire-Atlantique et Vendée sont très agréables à rouler, d'autant qu'à cette saison, plus de touristes contrairement à quand j'y suis passé, impossible de dormir sur la plage =(

    Pas trop de soucis pour passer la Rochelle ? c'est le coin qui m'a pas mal posé problème, mais faut dire qu'il y avait les Transmusicales. En tout cas bien content que tu es récupéré ta banane sans encombre, Grues un charmant petit village peuplé de gens non moins charmant, ça confirme mon impression =)

    Bonne route à toi !

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  6. Décidément tu me fera toujours sourire avec tes anecdotes.
    Bon voyage jusqu'à Toulouse

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  7. quel recit passionnant, et quelle aventure! en te lisant, j'ai presque l'impression de voyagé, je lis Menez Hom et ça me rappelle plein de souvenir,j'ai adoré cet endroit à la nature magique,(quand on y voit quelque chose parce que j'y suis retournée un jour de brume et on n'y voyait même pas ses pieds!)
    Malgrès quelques desidératae inérant à tous les voyages, te voilà bel et bien dans l'action et ça fait très plaisir de suivre tes étapes au fil de tes récits. Sacré coup de bol d'avoir pour le moment une si belle arrière saison, espérant que le soleil accomagnera encore ta descente vers le sud... Belle route à toi, on pense à toi de l'Est. Bisous.
    Isabelle

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  8. Salut Aymeric,

    Si tout va bien tu es de nouveau sur les routes à l'heure actuelle... et je relis ton passage sur la côte Atlantique. C'est marrant de voir qu'on a pratiquement emprunté les même routes à quelques mois d'écart... ça me rappelle mes galères dans le marais : je suis passé au plus près de la côte, je ne te raconte pas les méandres de ces petites routes moins larges qu'une voiture... souvenirs souvenirs...

    Bonne route à toi !

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La vie, c'est comme une bicyclette, il faut avancer pour ne pas perdre l'équilibre.
Albert Einstein.

La jeunesse est une victoire du goût de l'aventure sur l'amour du confort.
Douglas MacArthur.

C’est la contemplation silencieuse des atlas, à plat ventre sur le tapis, entre dix et treize ans, qui donne ainsi l’envie de tout planter là. Songez à des régions comme le Banat, la Caspienne, le Cachemire, aux musiques qui y résonnent, aux regards qu’on y croise, aux idées qui vous y attendent… Lorsque le désir résiste aux premières atteintes du bon sens, on lui cherche des raisons. Et on en trouve qui ne valent rien. La vérité, c’est qu’on ne sait comment nommer ce qui vous pousse. Quelque chose en vous grandit et détache les amarres, jusqu’au jour où, pas trop sûr de soi, on s’en va pour de bon.
Un voyage se passe de motifs. Il ne tarde pas à prouver qu’il se suffit à lui-même. On croit qu’on va faire un voyage, mais bientôt, c’est le voyage qui vous fait, ou vous défait.
Nicolas Bouvier.
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